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Photo du rédacteurStéphanie Loré

"Une autre Aurélia" de Jean-François Billeter chez Allia

Dernière mise à jour : 10 mars 2019


Jean-François Billeter a perdu sa femme Wen le 9 novembre 2012 à la suite d'une hémorragie cérébrale. Dans ce précieux petit livre, il raconte l'après en un hymne à l'amour profond pour celle qui fût son port d'attache durant 48 ans, un amour vif à jamais et, Dieu sait, enviable.

S'il est devenu comme "un jour blanc", il n'est nullement question de se demander s'il est heureux ou malheureux... parce que c'est dans le bonheur qu'il rejoint Wen - être heureux est donc une injonction -, parce qu'il s'agit en vérité de se trouver de nouvelles façons d'être, de "nouveaux réglages" face au dérèglement subi, et par-là même approfondir la connaissance de lui-même, sans rechercher la consolation mais en accueillant l'émotion. La féroce nostalgie, dit-il, et c'est rassurant, s'éteindra avec lui. A l'infini de leur amour, il a substitué le fini de la vie. Il ne désire pas être dans l'attente, le désir, le manque mais bien laisser Wen surgir à l'improviste, telle était-elle : espiègle. Il désire rester fidèle à cela qu'elle portait en elle : le goût du bonheur. Ce bonheur qui fût et est encore son socle.

Le manque, cependant, est présent, l'envie de retrouver son rire, le dialogue avec elle, sa main dans la sienne, le plaisir de donner, l'intimité, ces gestes qui n'appartenaient qu'à elle et qui le faisaient se sentir autre. "Ce que je n'ai plus : une personne à qui je puisse tout raconter"(p.17).

C'est par le récit qu'il recrée la présence de celle qui venait doubler la sienne. Il ne s'agit pas de deuil, non, plutôt "d'un passage d'un bonheur à un autre - de celui de vivre avec Wen à celui d'avoir vécu avec elle."(p.37)


Merci Monsieur Billeter d'avoir partagé vos émotions.

Merci pour votre prose sincère et pudique qui questionne nos attachements et tente de donner définition de ce qui nous fonde.


"Je me mets à traduire Lichtenberg, pour m'occuper : "Ce qui fait le charme de la vraie amitié et plus encore de l'heureux lien du mariage, c'est l'élargissement du moi, qu'aucun art au monde ne saurait produire. Deux âmes qui s'unissent ne s'unissent jamais au point d'abolir la différence si profitable aux deux, qui rend l'échange si agréable." p.41


"Je n'y avais pas songé : on se connaît soi-même et connaît l'autre de deux façons qui se complètent. Il faut donc être deux - non pour être un, comme l'a imaginé Platon, mais pour se connaître. C'était une erreur de placer au coeur de l'âme humaine la nostalgie de l'Un." p.54


"Je comprends ce qui se passe quand on tombe amoureux. L'activité dont je suis fait, qui peine à s'appréhender elle-même comme un tout, s'éprend : elle adopte la forme de la personne aimée et accède par là à un degré d'unité qui lui manquait. Elle se perçoit elle-même sous la forme de l'autre, elle est habitée par elle. On a l'autre en soi et hors de soi, ce qui crée une surréalité, un vertige." p. 69


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