Claudette Colvin a quinze ans lorsque, le 2 mars 1955, elle refuse de céder son siège à un Blanc dans un bus, arguant de ses droits - elle a payé ! Par ce geste, elle contrevient aux lois locales de Montgomery (Alabama) concernant la ségrégation raciale, des lois intraitables qui obligent la séparation des races dans les magasins, les transports ... les trottoirs. Des lois qui bien évidemment interdisent les unions inter-raciales.
Claudette sera arrêtée et jugée pour violation des lois, trouble à l'ordre public et agression - un accommodant mensonge.
Les leaders Noirs locaux s'emparent de son histoire, pensant qu'elle peut leur ouvrir une voie royale vers la Cour Suprême. Ils changent d'avis quand ils apprennent qu'elle est enceinte d'un Blanc, peu émus que ce soit à la suite d'un viol : elle serait trop suspecte aux yeux de leurs sympathisants !
Claudette ira se perdre dans l'anonymat de New-York dès 1958. Elle qui rêvait de devenir avocate travaillera comme infirmière de nuit jusqu'à sa retraite en 2004.
C'est Tania de Montaigne qui la tire de l'ombre en écrivant "Noire", son histoire, publié chez Grasset en 2015 (Prix Simone Veil). Elle réhabilite celle qui a posé un geste juste, fort et courageux neuf mois avant Rosa Parks. Elle tenait à mettre en lumière l'importance des femmes dans ce combat trop vite récupéré par les hommes, à rendre un nom à la mémoire collective.
L'adaptation en B.D. d'Emilie Plateau, dans un parti pris dépouillé, rend un bel hommage à Claudette Colvin. Le trait est naïf, comme un écho au caractère de l'héroïne - parce qu'héroïne ,elle l'est assurément. Les décors sont minimalistes, les couleurs sobres - une trichromie de noir-blanc-marron -, de la retenue graphique qui souligne la puissance et l'universalité du propos.
"Je suis fière de ce que j'ai fait. Je pense que ce que j'ai fait a été une étincelle et que cela a pris."
Lisez ... parce que s'il est vrai qu'un mouvement peut naître d'une seule personne, il prend de l'ampleur en s'appuyant ensuite sur les épaules d'autres...
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