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Photo du rédacteurStéphanie Loré

"Le parc à chiens" Sofi Oksanen chez Stock


Sofi Oksanen est une auteure qui secoue les consciences en plongeant dans les abîmes les plus sombres de l'âme humaine et c'est éblouissant. Elle m'a ravie avec "Purge", "Les vaches de Staline" et "Quand les colombes disparurent", des romans au coeur de l'histoire et des souffrances des pays de l'Est. Elle a perdu mon attention par la suite, je ne reconnaissais plus son style percutant. C'est avec bonheur que je renoue avec elle et ce magistral "Le parc à chiens" dans lequel je retrouve son écriture ensorcelante et son univers singulier.

Le roman commence à Helsinki en 2016 où nous faisons la connaissance d'Olenka, jeune femme aux abois dont nous allons apprendre le tragique destin en agençant les pièces du savant puzzle que l'auteur nous donne à construire.

"Tout aurait pris une autre tournure, peut-être, si je l'avais reconnue immédiatement et si j'étais partie en courant. Mais je ne l'ai pas fait (...)."

Tout a commencé en 2006, dans l'oblast de Mykolaïv. Fuyant Paris et les maigres perspectives d'une vie de mannequin, Olenka revient chez sa mère. Elle a besoin d'argent et, dans un premier temps, elle accepte de donner ses ovocytes pour un public étranger en mal d'enfant, un trafic de luxe. Parce qu'elle est belle et qu'elle sait convaincre, elle devient vite coordinatrice et recrute des jeunes filles qui rêvent grand. Quand son chemin croise celui de Daria, elle sait que celle-ci deviendra son étoile, la perle rare qui fera d'elle une star dans son domaine. Des femmes parfaites pour des enfants parfaits... Daria est une merveille de la nature. Olenka aide à la manipulation et l'exploitation de filles fauchées sans éprouver le moindre remords. Jusqu'à ce que la situation dérape dangereusement, l'obligeant à disparaître en laissant derrière elle sa famille, son pays, l'homme qu'elle aime, auquel elle n'arrive pas à parler et qui est l'un de ceux qui la traquent. Une vie d'exil à laver le linge des autres ne semble pas être une punition suffisante.

Quel est cet étrange marché qu'elle a passé et qui a précipité l'enchaînement malheureux ?


En mêlant les temporalités, Sofi Oksanen ménage le suspense et c'est savoureux. Elle s'attache ici encore à ses thèmes de prédilection : les bouleversements dans l'Ukraine post-soviétique, la soumission forcée, les abus sexuels - il y a un saisissant parallèle entre l'oppression d'un pays entier et celle subie par le corps des femmes -, la jalousie amoureuse, le passé dont l'on ne peut se défaire et qui façonne notre présent, le corps marchandise. Il y a aussi le thème de la maternité et des limites que certains franchissent pour l'atteindre; celui de la culpabilité et de la difficulté de reconstruire une relation de confiance après une trahison.

Sofi Oksanen explore les zones les plus intimes de la vie humaine et le fait avec brio. Elle inquiète, dérange et captive.


"Ce qui m'attire avant tout, ce sont les destins bâillonnés, les personnages muets, les histoires tues. S'approcher du non-dit et tenter de l'articuler, n'est-ce pas l'essentiel de l'écriture ?"

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