Meg Wolitzer est une écrivaine de l'intime bouleversé, de ces failles où s'engouffrent les doutes et qui, au-delà de la douleur, sont offres de possibles.
A la suite de l'étonnant "La Position" - qui racontait la façon dont quatre enfants deviennent adultes après avoir découvert tôt que leurs parents ont écrit un manuel sur la sexualité -, l'émouvant "la Doublure" - l'histoire d'une sexagénaire qui, le temps d'un vol pour rejoindre son célèbre écrivain de mari, revit leur relation -, elle revient avec un roman inspiré de certaines tempêtes toujours actuelles, à savoir les débats et batailles autour du féminisme.
Nous sommes au début des années 2000. Greer Kadetsky est une jeune étudiante dont les parents babas cool sont peu intéressés du devenir. En raison de leur nonchalance envers la paperasserie, elle doit se contenter d'une université de seconde zone, Ryland. Sa vivacité et son intelligence la sortiront malgré tout de son milieu. Elle est en couple avec Cory Pinto, un ami d'enfance, son double, et la distance n'altérera en rien leur lien. Tous deux se soutiennent.
Sa vie se pare de nouvelles couleurs quand elle assiste à une conférence de Faith Frank, une séduisante femme de 60 ans qui s'est toujours battue pour les droits de la femme. Greer se reconnaît en elle, elle a le même caractère, caché là, qui ne demande qu'à s'épanouir. Ses études terminées, elle se fait engager dans la Fondation pour la défense des plus démunies que Faith vient de créer grâce aux fonds apportés par un homme d'affaires amoureux transi, à distance depuis 40 ans - un capitaliste qui se révèlera un peu douteux. Faith donnera à Greer cette permission qu'elle ne se donne pas : être elle-même.
Meg Wolitzer met en lumière l'interaction entre l'intime et le politique, les conflits de génération et la façon dont le féminisme se transmet. Elle parle du passage à l'âge adulte, des limites de l'idéalisme, des compromis nécessaires sans pour autant se perdre à soi et du rôle phare que peuvent jouer certaines personnes dans notre épanouissement. Au centre du roman, la femme et son corps, la femme et sa liberté, plutôt ses libertés, qu'elles soient sexuelles, sociales ou professionnelles. Il y est question d'amour et de désir, d'amitié et de pardon, d'identité et d'acceptation - "J'aime être une fille. Simplement, je veux décider de ce que ça signifie." p.254 -, de réussite et de pouvoir -"Le pouvoir finissait par se dissoudre. Les gens faisaient ce qu'ils pouvaient, avec la puissance dont ils étaient capables, jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus. Le temps était compté." p.434
La "persuasion" des femmes, à la fois le fait de les convaincre de leurs justes droits et leur assurance, leur conviction.
Et cette impression au goût amer que le combat n'est pas près de finir...
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