Une fille enterre sa mère.
Amalia venait rejoindre sa fille Delia à Rome pour l'anniversaire de celle-ci. Elle n'arrivera jamais, noyée là-même où, jadis, la famille passait ses vacances.
Après la cérémonie, ses soeurs reparties, son père aux abonnés absents, son oncle toujours en colère contre la défunte pour avoir abandonné son mari en emmenant ses filles, Delia vide l'appartement de sa mère et erre dans Naples, la tête emplie d'interrogations.
Que s'est-il passé ? Pourquoi sa mère portait-elle des sous-vêtements de luxe, elle toujours vêtue de nippes ? Où sont les vêtements qu'elle avait sur elle ? Pourquoi Caserta la suit-il ? Caserta, l'ami de jeunesse de ses parents, à l'origine de disputes sanglantes.
Delia revit son enfance entre une mère qui plaisait sans en avoir l'ambition, une femme qui entretenait un rapport amical avec le monde, une femme joyeuse, et un père jaloux, égoïste, querelleur, violent.
Delia, qui a tôt voulu s'émanciper de sa mère, éprouve le besoin de remonter le fil des souvenirs, de comprendre, d'entrer dans la peau de celle-ci pour tourner la page et repartir de neuf.
Le premier roman d'Elena Ferrante, paru chez Gallimard en 1995, réédité cette année.
Un très bon roman, au style maîtrisé, plus sombre que sa production ultérieure. Un roman qui traite son thème de prédilection : les relations mère-fille et ce qu'elles supposent d'ambiguïté, de tension, de non-dit.
L'écriture est sensuelle, presque animale, au plus près des corps pour dire la violence sourde, l'intimité qui peut meurtrir, l'attraction fatale de tout ce qui vient briser les équilibres précieux de notre vie et de celles de ceux que nous aimons. Plutôt que d'un amour harcelant, je parlerais d'un amour blessant, parfois importun, parfois agaçant, un amour sans lequel nous ne pouvons vivre mais dans lequel il est facile de se perdre.
"L'enfance est une fabrique de leurres qui durent à l'imparfait." p.169
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