Au départ, il y a une pièce qui aurait dû devenir un film. Et puis, il y a une bande dessinée... et bonheur !!
Nous y découvrons Edmond Rostang en 1895, peinant à trouver le chemin du succès, plombé par l'accueil peu indulgent d'un public outré par l'ennui d'une longue déclamation en vers. Et peu importe que ce soit la sublime Sarah Bernhardt qui incarne "La Princesse lointaine"!
Edmond est déçu, abattu et se demande si le théâtre a encore de belles années devant lui face à la magique invention des frères Lumière. Soutenu par son épouse et son amour des mots, il continue à chercher l'inspiration. Il la trouve chez "Honoré", une brasserie tenue par ledit Honoré, un Noir à la verve éclatante et au verbe haut qui va lui insuffler l'idée de son Cyrano.
Quand Sarah Bernhardt le met en relation avec Coquelin, un célèbre comédien tenu à la gorge par quelques créances et qui lui passe commande, il retrouve son enthousiasme et un moteur à son écriture. Dans l'urgence et la plus totale improvisation, il écrit son "Cyrano de Bergerac" qui sera pour la première fois joué le 28 décembre 1897 sur la scène du Théâtre de la Porte Saint-Martin à Paris. Le succès est fulgurant, retentissant, fracassant et fait l'unanimité. Edmond Rostang a vingt-neuf ans et entre dans la légende. Qui plus est avec une pièce en Alexandrins ! un camouflet aux tristes figures qui ont rejeté son oeuvre précédente. Et le siècle passant verra sa revanche : le succès est inusable et les plus grands comédiens s'y frottent devant un public qui reste fervent.
Cette bande dessinée est drôle et truculente tant par la valse des quiproquos, le piquant des mots que par le trait du dessinateur qui s'amuse de la caricature. C'est dynamique, haut en couleurs, d'une puissance verbale réjouissante. Du panache !!
"Si mes mots sont hésitants c'est parce qu'il fait nuit. Dans cette ombre... à tâtons... ils cherchent votre oreille. Ils trouvent tout de suite ? Oh ! Cela va de soi, puisque c'est dans mon coeur, eux, que je les reçois. Or, moi, j'ai le coeur grand... vous l'oreille petite. D'ailleurs vos mots à vous descendent... ils vont vite. Les miens montent, Madame. Il leur faut plus de temps. De cette gymnastique, ils ont pris l'habitude. Et vous me tueriez si de cette hauteur, vous me laissiez tomber un mot dur sur le coeur."
Comments